Texte Dominique Cerf
Avec cette beauté qu’il transportait tant physique que spirituelle.
Sa sensibilité à fleur de peau et sa colère incandescente.
Aujourd’hui ces dessins sont là et il faudrait qu’ils puissent traverser l’espace.
Lui était une sorte de funambule.
Son univers fait de doutes et de surprises.
Il aimait le doute car dans le doute il y a l’inconnu.
Il aimait les voyages, les rencontres, les livres, la poésie, la musique.
Il aimait la Vie.
Un sentiment politique l’habitait.
Un sentiment poétique faisait sa vie.
Il y a les mots qui lui vont si bien: Fulgurance, Intelligence, Liberté….
Des fusains du si sombre au si clair.
Une façon d’obtenir ces blancs, ces gris, du noir le plus profond au blanc, par un geste violent avec le bruissement de la gomme sur le papier.
De grands papiers tendus au mur, comme sa main, vers une forme d’exploration originelle du monde.
Il aimait les monstres de légendes , la pieuvre solitaire et farouche avec un petit coup de tentacule et de l’encre noire jaillissante….
Il aimait particulièrement les gorilles. Il disait travailler sur la monstruosité.
Travailler d’instinct.
Monstruosité et séduction de Jonathan Swift à Michel Leiris, de Jérôme Bosch à Antonin Artaud……
Du Tribunal des Chevaux au Jardin des Délices…..
Ce sentiment de connaître Sylvain depuis l’enfance, notre enfance.
Je l’ai immédiatement aimé avec son travail, ses fusains, ses fêlures.
Avec ce sentiment d’appartenir à la même famille.
Je l’aimais parce qu’il repoussait les limites de son corps , qu’il savait danser
avec son fauteuil roulant pendant que d’autres restent assis dans leur corps absent.
Aujourd’hui, il reste présent, son univers sort du rêve avec une si grande force.
Le Faune assis sur une petite chaise me touche et me trouble particulièrement, dans ce lien à lui,
à la fois si ténu et si profond.
La longue barque prémonitoire l’a emporté mais il reste sur cette rive, comme immortel et corrosif.
Dominique CERF