Sylvain Gérard

Artiste contemporain, fusain, dessins, pastels, aquarelles, peinture

Texte François Bazzoli

Inventaire pour Sylvain

Un torrent d’images qui intercepte un autre torrent d’images et qui se mêlent inextricablement en un flot de références et de rêves inextricables, violents et doux. Une rencontre inopinée sur chaque page, de personnages ou d’objets, de paysages ou d’architectures comme si chaque page était une rencontre. Un ensemble d’impossibilités physiques et mentales rendues simples et évidentes comme une illustration des imaginations enfantines dans un livre qu’on ne connaît pas. Des humains et des animaux dans un même temps mais pas dans le même espace. Une pluralité de continuités hasardeuses qui créent comme une faille spatio-temporelle où se perdre, où se retrouver. L’apparence de collages alors qu’aucune altérité ne se distingue sur la feuille. Une monochromie désenchantée qui tient lieu de palettes. Beaucoup de noir profond même quand le gris, le bistre, le blanc dominent. Des fantômes trop bien délimités qui surnagent dans l’angoisse de la page. Des formats somme toute normaux qui paraissent souvent démesurés. L’impression que l’artiste vous offre son monde d’obsession et de mirages sans qu’on puisse toujours l’atteindre. La sensation inconfortable de tomber dans un trou sans fond, mais hors d’angoisse, comme Alice tombant au fond du trou du lapin blanc. L’impossibilité notoire de ne pouvoir être plus qu’un spectateur. La somme de toutes les peurs vue comme l’addition des délices. Là où le noir est peut-être une couleur comme l’affirment des titres d’expositions ou les opinions de certains critiques.  Des paradoxes, toujours des paradoxes…

Et enfin le fait accompli : le travail est maintenant refermé même s’il n’était plus nourri depuis longtemps. Pourtant, il avait bien semblé se renouveler constamment à l’intérieur de ses propres limites, de sa configuration obstinée. De fusains en collages, de portraits en fantasmes, d’autodérisions en appels à l’autre. Les images peuvent enfin se superposer dans les mémoires afin de cesser d’être des dessins pour devenir, finalement, finalement, une œuvre.

François Bazzoli